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Isabelle Evrard

Portrait d’Éditrice de mobilier: Sandra, de Studio Senac

Aujourd'hui, nous découvrons le parcours inspirant d'une éditrice de mobilier qui a choisi de se réinventer professionnellement à l'âge de 45 ans. Passionnée par le design et les objets avec une âme, elle nous partage son amour pour le bois et les créations artisanales, ses expériences passées dans la communication digitale, et son engagement profond envers l'écoresponsabilité. Entre anecdotes touchantes et défis surmontés, elle nous dévoile les valeurs qui guident ses choix créatifs et ses projets futurs au sein de Studio Senac.


Peux-tu partager avec nous l'histoire qui se cache derrière la naissance de ton métier d’éditrice de mobilier et de Studio Senac?

Sandra Barbier - Studio Sénac
Sandra Barbier - Studio Sénac

 Ce métier est pour moi une reconversion à 45 ans ! Mais cela me paraît si évident aujourd’hui. J’ai toujours été passionnée par les objets dont j’aime m’entourer pour leur supplément d’âme et leur esthétique, et par l’univers du design pour lequel j’ai affiné mon œil auprès d’ami(e)s connaisseur(se)s et en chinant aussi beaucoup... J’ai un réel attrait pour le bois. Adolescente je fabriquais très souvent les objets-cadeaux que j’offrais, je trouvais cela plus touchant, plus sensible. Je récupérais de beaux morceaux de bois puis je bricolais pendant des heures, je n’avais pas beaucoup de technique mais je prenais beaucoup de plaisir. Cette passion ne m’a jamais vraiment quittée mais étrangement je n’en ai pas fait mon métier. C’est dans la communication digitale que j’ai passé plus de 20 ans à explorer le web et la toile pour façonner des contenus multimedias, diffuser de l’information et plus récemment promouvoir la création culturelle et artistique. J’ai un côté très geek ou même maker, j’aime comprendre comment les choses fonctionnent et mettre les mains dans le cambouis. Sauf que le numérique impose d’être toujours très connecté, en alerte et je crois que ça m’a usée. J’avais besoin de me reconnecter aux être humains ! Et c’est lors d’un bilan de compétences que le sujet est revenu sur la table. Et cette fois j’ai décidé de me faire confiance. Je ne savais pas précisément quelle serait ma nouvelle activité mais je souhaitais qu’elle associe la promotion d’artisan(e)s, de designers, des objets beaux et utiles et que surtout elle crée du lien ! Et c’est quand je suis tombée sur la photo de la Balançoire U. imaginée par la designer Lily Saillant, sur le portfolio des anciens étudiants de l’école des Arts décoratifs de Paris, que j’ai su que je voulais devenir éditrice ! Un projet un peu fou mais qui finalement fait sens avec mon parcours et m’anime depuis un an et demi en me guidant chaque jour vers des aventures inédites et des rencontres passionnantes.



Lily Saillant, designer
Lily Saillant, designer

Balançoire U
Balançoire U - Photo Virginie Lambinet


Peux-tu partager une anecdote inspirante ou un moment clé qui a profondément influencé ton approche créative ou ton parcours en général ?


Je crois que ce sont les 6 années passées à piloter la communication digitale du Mucem à Marseille de 2017 à 2022. J’en rêvais depuis près de 10 ans déjà, j’ai repris un master en 2009 à l’EJCAM avec comme objectif de travailler au Mucem ! Promouvoir la création, la connaissance au sein d’un musée national, côtoyer commissaires d’exposition, conservateur(rice)s du patrimoine, artistes, plasticien(ne)s, collègues de travail passionné(e)s et passionnant(e)s est une expérience incroyable qui nourrit sa curiosité au quotidien. Et j’ai appris beaucoup durant cette mission, en portant des projets de belle envergure et en relevant de jolis défis en équipe. Cela m’a donné confiance en moi et l’envie de poursuivre pour valoriser la création, qui est infinie


Quels valeurs caractérisent le plus ton travail en tant qu’éditrice, et comment ceux-ci se reflètent-ils dans tes choix créatifs et dans studio Senac?


Je débute donc je n’ai encore pas l’expérience et le recul suffisants pour savoir si mes choix seront porteurs ! Mais c’est sans doute l’instinct. Il est difficile d’expliquer de manière objective pourquoi tel objet nous fait réagir, pourquoi cette forme, cette texture, mais si je ressens une émotion alors je me laisse porter. Ensuite, il y a une relation qui se noue avec l’objet et le travail de l’artiste/artisan(e) qui va permettre d’avancer dans le processus créatif. Car cela peut aussi partir d’une idée de création d’objet et dans ce cas là mes choix vont se porter sur une personnalité, un univers mais il faut qu’il y ait de la sincérité dans l’échange et de la confiance. Ça ne s’explique pas mais si l’idée est là, alors je la suis. Je procède de la même manière dans le choix de mes sélections pour la partie galerie de mon projet qui ouvrira à Marseille en fin d’année et qui existe déjà sur ma galerie en ligne www.studiosenac.fr

Tripode, bol en châtaignier Jérémy Aymard, ébéniste-designer
Tripode, bol en châtaignier Jérémy Aymard, ébéniste-designer
Lampe Ruche, Ju. Studio Julien Legoff designer
Lampe Ruche, Ju. Studio Julien Legoff designer



Comment intègres-tu la dimension éco-responsable dans ton travail, que ce soit dans le choix des matériaux, les méthodes de fabrication, ou d'autres aspects de ton processus créatif ?


La dimension éco-responsable est le fil conducteur de mon travail. C’est quasiment plus important même que l’objet créé. C’est un engagement qui doit me guider dans ma nouvelle activité pour y trouver du sens. J’ai d’ailleurs commencé ma reconversion par une formation à l’écoconception au sein de la manufacture ICI Marseille. En 2024 on ne peut pas être conscient du niveau d’épuisement des ressources naturelles et continuer à puiser dedans sans remettre en question certaines pratiques. D’ailleurs, si on voulait vraiment approcher l’impact neutre dans la création d’objet et de mobilier tout comme en construction ou en rénovation, il faudrait s’en tenir au surcyclage ou à l’up-cycling. Je n’ai pas fait ce choix là mais j’ai mis en place un cahier des charges exigeant qui m’amène à suivre les bonnes pratiques de l’éco-conception à la fois dans le choix des matières premières, la manière dont elles sont produites, le moins transformées possibles, en choisissant bien sûr des matières renouvelables, des traitements respectueux de l’environnement tout cela dans une approche du cycle de vie complet de l’objet. Et aussi bien sûr en travaillant avec des artisans locaux.


Pour la Balançoire U., j’ai tenu à sélectionner une essence de bois locale, frêne ou châtaignier, et des artisans locaux pour fonctionner en circuit-court avec les fournisseurs et les fabricants et ainsi soutenir à ma mesure l’économie locale.

C’est un ensemble vertueux que l’on doit pouvoir remettre en place qui permet également une vraie richesse dans l’échange par la proximité des interlocuteurs et des partenaires. C’est aussi la raison pour laquelle j’adhère à l’association Forêt modèle de Provence, reconnue d’utilité publique, soutenue par les institutions de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et qui œuvre pour une gestion durable de nos forêts. C’est passionnant de découvrir la complexité des écosystèmes et ça oblige à adopter une ligne de conduite respectueuse.


Avec Studio Senac, je souhaite aussi que les valeurs de l’éco-conception puissent se traduire dans la répartition de la valeur et la juste rémunération de chaque partie prenante du projet. Cela a forcément un impact sur le coût de production et le prix de vente mais c’est à ce prix que nous réintègrerons la valeur de chacun.


Comment sensibilises-tu tes fournisseurs, tes partenaires, tes clients à l'importance de l'écoresponsabilité dans l’édition et quelles réactions as-tu observées de leur part ?

Certaines des personnes avec qui je travaille sont déjà ultra convaincues, d’autres moins sensibilisées, alors j’essaie d’être patiente, de ne pas sembler trop pénible quand je demande à un fournisseur la fiche sécurité d’un produit ou l’impact d’un traitement, car je dois moi aussi me former et apprendre encore beaucoup sur les alliages et les compositions. Le sujet concerne principalement les traitements que l’on peut appliquer sur les matières premières ou la manière dont on les extrait ou même tout simplement la méthode de coupe du bois. C’est souvent une discussion très intéressante car en écoconception il ne s’agit pas de devenir non plus trop radical mais de choisir le meilleur bénéfice/risque. Et in fine, il faut aussi convaincre le client. Le sensibiliser à la valeur du travail de l’artisan et à la démarche de conception et de fabrication qui est aussi parfois plus longue, accepter de passer commande et d’attendre quelques semaines ou même quelques mois avant de pouvoir disposer de l’objet acheté. Mais c’est une discussion qui se crée avec les clients pour leur expliquer notre démarche, et cela apporte une dimension nouvelle où ils intègrent finalement le process de fabrication puisque pour certaines pièces on ne lance la fabrication qu’à partir d’un certain nombre de commandes. Même si cette démarche nécessite que le client s’engage, je suis assez confiante car les consommateurs de sont de plus en plus nombreux à vouloir connaître l’origine des matières premières utilisées lorsqu’ils achètent un objet ou du mobilier et nombreux sont les amateurs de belles pièces à soutenir ces démarches créatives.

Paris design week

Qu'est-ce qui rend spéciale la réalisation du premier objet édité par Studio Senac ? Et quelles difficultés surmontes-tu pour la mener à bien ?

C’est de loin le fait d’apprendre de manière empirique un nouveau métier! Mais heureusement je m’entoure de professionnels compétents sur lesquels je peux m’appuyer et le fait de constituer des petites équipes crée instantanément la proximité et la confiance nécessaires pour faire avancer le projet. Le plus dur étant de planifier les étapes importantes en développant à a fois le prototypage, la communication et la commercialisation de l’objet. Ce qui est également très excitant dans cette première réalisation c’est d’espérer que ce qui était une intuition au départ puisse devenir un joli succès. Or il se trouve que La Balançoire U. vient de recevoir la mention “Coup de coeur” du jury au Concours Bois Français & Design 2024 organisé par FIBOIS Île-de-France, à la fois pour son design et son approche de fabrication éco-responsable. C’est tellement encourageant de recevoir un prix dès la première année du lancement d’un projet alors forcément cela nous porte et nous donne beaucoup d’énergie. D’autant que la Balançoire U. sera exposée à la Paris Design week du 5 au 14 septembre 2024 sur le stand FIBOIS dans la cour de la Bibliothèque historique de la ville de Paris sur le thème du Design en plein air autour de solutions innovantes pour réinventer notre usage de la ville. L’occasion, nous l’espérons, de réussir la phase de commercialisation de ce premier objet poétique et singulier de studio Senac.


En quoi consiste le processus créatif type pour toi, de l'idée initiale à la réalisation finale d'une pièce ou d'un projet ?


C’est la magie qui opère à chaque étape du processus créatif. D’abord l’idée qui surgit, puis la réflexion, la conception, la rencontre avec les designers, les artisans, les discussions autour de la fabrication… Le temps passé à observer le travail de chacun puis évidemment ce moment où l’on découvre la pièce réalisée qui a pris forme et que l’on va pouvoir présenter à une clientèle sensible, à ce travail à la fois minutieux et ingénieux sur lequel chacun de nous aura essayé de donner le meilleur et qui donnera lieu à nouveau à de beaux échanges avec les clients qui auront comme nous un coup de coeur et souhaiteront en faire l’acquisition.


Ce n’est sans doute que du PARTAGE finalement !


Enfin, aurais-tu un prochain projet à nous partager ?

Ah ah ! Alors oui, j’ai plusieurs projets d’édition pour commencer à constituer une gamme d’objets décalés et poétiques. La Balançoire U. est avant tout un coup de cœur que j’ai choisi de suivre mais je n’ai pas fait le choix de ne fabriquer que du mobilier outdoor ! Le premier sera très certainement une assise inspirée d’un modèle vintage en bois et tissu coloré et le deuxième un bjet à poser sur la table, utile et décoratif créé à partir d’une base recyclée. Il y a aussi des petites collections de contenants qui devraient voir le jour suite à la rencontre du travail d’un tourneur et le don de souches de bois locales que le bûcheron ne voulait pas brûler.


Et puis le dernier objet que j’ai sélectionné pour la partie galerie, qui plaît déjà beaucoup : un bougeoir en grès de Saint-Amand réalisé par la céramiste Elidiane Soarès madamesolo, dont la forme géométrique très harmonieuse m’a tout de suite touchée et que j’ai souhaité compléter avec des cierges “haute couture” fabriqués à la main par les artisans de la Ciergerie des Prémontrés, dernière ciergerie de Provence, labellisée Entreprise du patrimoine vivant.


Des idées qui se construisent au jour le jour autour des savoir-faire et du lien humain.


Bougeoir Luz madamesolo pour Studio Sénac (Photo Virginie Lambinet)
Bougeoir Luz madamesolo pour Studio Sénac (Photo Virginie Lambinet)

Bougeoir Luz madamesolo pour Studio Sénac (Photo Virginie Lambinet)

Bougeoir Luz madamesolo pour Studio Senac (Photo Virginie Lambinet)



Merci à toi Sandra d'avoir pris le temps d'y répondre! Retrouvez le site Studio SENAC ainsi que son compte instagram @studiosenac



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